France – Cour Nationale du Droit d'asile, 5 octobre 2016, Mme Y., N° 14012645

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Pays dans lequel la décision est prise:
Pays d’origine du demandeur:
Date de la décision:
05-10-2016
Citation:
CNDA, Mme Y, Decision No 14012645, 5 October 2016
Court Name:
Cour Nationale du Droit d’Asile
Relevant Legislative Provisions:
International Law > 1951 Refugee Convention
International Law > UN Convention on the Rights of the Child
National / Other Legislative Provisions:
France - Cesda (Code of Entry and Stay of Foreigners and Asylum Law L 723-3
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Résumé succinct: 

Arguant de l’irrégularité de la procédure suivie par l’Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) du fait de l’absence du représentant légal ou d’un administrateur ad hoc durant l’audience d’une demandeuse mineure, la Cour Nationale du Droit D’Asile (CNDA) annule la décision de l’OFPRA et y renvoie la demande d’asile pour examen.

La CNDA pose les limites au principe de l’unité de famille en ce qu’il n’est pas applicable par extension à l’enfant d’une réfugiée ayant obtenu la qualité de réfugiée par l’entremise du principe de l’unité de famille après son union avec un réfugié statutaire n’étant pas le père de l’enfant en question.

Faits: 

Ayant fui les Comores en novembre 2013, Mme Y., alors mineure, a présenté une requête auprès de l’OFPRA aux fins de recevoir la qualité de réfugiée, ou du moins le bénéfice de la protection subsidiaire et ce :

  • Soit par l’effet de l’application du principe de l’unité de famille, étant la fille mineure d’une réfugiée statutaire ;
  • Soit du fait de sa crainte personnelle de persécutions du fait de menaces reçues de la part d’individus si elle venait à retourner dans son pays d’origine.

L’OFPRA a rejeté la demande de Mme Y. par une décision datée du 31 mars 2014, faisant suite à une audience où la requérante n’était pas assistée de sa représentante légale ni d’un administrateur ad hoc alors qu’elle était mineure.

Mme Y. a alors déposé un recours auprès de la CNDA le 29 avril 2014 demandant à la cour d’annuler la décision du directeur général de l’OFPRA pour irrégularité et d’accéder à sa demande d’asile selon les moyens ci-hauts évoqués.

Décision & Raisonnement: 

La CNDA rappelle tout d’abord sa compétence pour annuler une décision prise par le directeur général de l’OFPRA lorsque la décision visée a été prise sans procéder à l’examen individuel de la demande ou alors lorsque celui s’est dispensé d’un entretien personnel avec le demandeur en dehors des cas prévus par la loi au titre de l’article L. 733-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

En l’espèce, alors que l’office ne s’était pas estimé dispensé par la loi de convoquer la requérante à une audition, la CNDA a retenu qu’en méconnaissant ensuite les dispositions de l’article L. 751-1 du CESEDA tel qu’en vigueur à la date de la décision attaquée, selon lequel un mineur demandant l’asile doit être assisté et représenté par un représentant légal –à défaut duquel un administrateur ad hoc doit être nommé pour remplir ces fonctions, l’office s’est rendu coupable d’une irrégularité de procédure substantielle à même de caractériser une privation irrégulière du droit à l’entretien. Par suite, du fait du caractère essentiel et de la portée de la garantie en cause, cette irrégularité est suffisante pour entraîner l’annulation de la décision du directeur général de l’OFPRA. Pour étayer sa décision, la CNDA cite également la « considération primordiale » qui doit être attachée à « l’intérêt supérieur de l’enfant » lorsque sont entendues des demandes d’asile formulées par des mineurs tels qu’évoqués par l’article 3 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant.

D’autre part, la cour s’est attelée à la question de la possibilité de l’extension du principe de l’unité de famille à un enfant mineur dont la mère n’est devenue réfugiée que par l’application du principe-même suite à son mariage  avec un réfugié statutaire n’étant pas le père de l’enfant concerné.

Si la Cour réaffirme le principe général de l’unité de famille découlant de la Convention de Genève, elle choisit d’en poser les limites en excluant la situation de la requérante du champ d’application du principe en justifiant ce refus comme suit : n’étant pas la fille du réfugié statutaire par l’entremise duquel la mère de Mme Y., en l’épousant, a pu obtenir la qualité de réfugiée, la requérante n’est pas fondée à bénéficier du principe de l’unité de famille, celui-ci étant considéré comme n’ayant pas vocation à s’appliquer à l’ensemble des personnes se trouvant à la charge d’un réfugié.

 Sur la demande d’asile fondée sur les craintes personnelles de persécution en cas de retour aux Comores, la cour a estimé qu’elle ne disposait pas d’éléments suffisants pour parvenir à une décision et renvoie alors l’affaire devant l’Office, précisant que la majorité de la requérante n’avait aucune incidence sur la demande de protection.

Résultat: 

La décision de l’OFPRA est annulée du fait de l’irrégularité de procédure et la demande d’asile y est renvoyée pour examen. 

Observations/Comments: 

L’absence d’un administrateur ad hoc lors de l’audience d’un demandeur d’asile mineur tenue par l’OFPRA constitue une irrégularité de procédure à même de justifier l’annulation de la décision du directeur général de ce dernier par la CDNA.

En posant par ailleurs des limites à l’application du principe de l’unité de famille de façon à exclure des enfants dans la situation de Mme Y., la décision de la CNDA semble à même de renforcer le caractère précaire de la situation de ces familles, posant clairement une différence de traitement entre les enfants issus de différentes unions.