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Home ›Belgique - Conseil du Contentieux des Etrangers, 27 janvier 2016, Nr. 160664
Art
L’exigence que le ressortissant belge rejoint dispose de moyens de subsistance qui sont stables, réguliers et suffisants doit être interprétée dans le sens que les moyens financiers du demandeur même peuvent être pris en compte. Ceci est le cas parce que selon l’art. 221 al. 1 et 2 du Code civil, le ressortissant joint Belge peut légalement disposer des moyens financiers de son conjoint qui est le requérant.
Le requérant venait du Cameroun, un pays-tiers, et entrait en Belgique en août 2009 via un visa d’étudiants (visa B1/B2). En octobre 2010, il a obtenu une autorisation de séjour fondée sur l’article 58 de la loi du 15 décembre 1980 et valable jusqu’en octobre 2011. Le requérant poursuivait ensuite ses études dans un établissement qui ne répondait pas aux exigences permettant de demander un visa d’étudiant. Le requérant a donc demandé la prolongation de l’autorisation de séjour selon l’article 9 bis de la loi du 15 décembre 1980. Cette demande ainsi que son recours ont été rejetés.
En 2014, le requérant s’est marié à une ressortissante belge. En Février 2015, le requérant a introduit une demande de carte de séjour de membre de la famille d’une ressortissante belge.
La demande a été refusée car il n’a pas prouvé dans le délai requis que sa conjointe dispose des « moyens de subsistance stables, réguliers et suffisants » afin de le soutenir. Sa conjointe ne répondait pas à l’exigence car son dernier contrat de travail avait terminé en octobre 2014 et parce que depuis-là elle se trouvait sans travail.
Au moment de la demande, le requérant gagnait 1400 € par mois. Son salaire était donc plus élevé que le seuil de 1307,78 € requis pour justifier des « moyens de subsistance stables, réguliers et suffisants » (cf. art. 14 § 1, n° 3 de la loi du 26 mai 2002 concernant le droit à l’intégration sociale). L’Etat belge a pourtant refusé sa demande.
L’Etat avançait que selon l’art 40ter de la loi du 15 décembre 1980, le salaire du requérant ne pouvait pas être pris en compte pour l’analyse du seuil des moyens de subsistance.
Le requérant avançait que la motivation de la décision n’était pas adéquate car l’Etat n’avait pas pris en compte des biens communs dont dispose le couple marié ce qui inclut les biens du requérant.
Le CCE s’est concentré sur l’interprétation du mot « disposer de (quelque chose) » prévue par l’article 40ter, alinéa 2 de la loi du 15 décembre 1980. Le CCE a remarqué que la finalité de cette disposition était d’éviter qu’un membre étranger de famille devienne une charge pour les pouvoirs publics.
Art. 40ter alinéa 2 transpose la Directive 90/346/CEE (ensuite abrogée par la Directive 2004/38/CE). La CJUE avait clarifié antérieurement qu’aucun critère supplémentaire devrait être ajouté en ce qui concerne l’origine des moyens financiers du ressortissants de l’UE (C 408/03, 23 mars 2006, Commission v. Belgium; C-218/14, 16 juillet 2015, Singh et. al.).
Selon le dictionnaire Larousse, la définition des termes « disposer de (quelque chose) est la suivante : « pouvoir s’en servir, en user, l’utiliser ».
Le CCE fait référence à l’article 221 alinéa 1 et 2 du Code Civil qui prévoit que chacun des époux contribue aux charges du mariage selon ses facultés. A défaut par l’un des époux de satisfaire cette obligation, l’autre époux peut, sans qu’il soit besoin de prouver une faute, se faire autoriser par le tribunal de la famille à percevoir à l’exclusion de son conjoint, dans les conditions et les limites que le jugement fixe, les revenus de celui-ci.
La finalité d’imposer un minimum de moyens de subsistance pour l’autorisation de séjour était d’éviter que le demandeur devient une charge pour les pouvoirs publics. Ainsi, en vue de l’article 221 alinéa 1 et alinéa 2, le CEE ne voyait pas pourquoi le salaire du demandeur ne devrait pas être retenue pour prouver que le ressortissant joint belge accomplit l’exigence de disposer des moyens de subsistances suffisants.
Demande accordé
La Cour a rejeté l’interprétation du Conseil d’Etat sur les points suivants:
Le CE soutient que dans sa décision rendue le 23 avril 2015, le Conseil Constitutionnel (CC) s’est expressément référée à la prorogation d'un titre de séjour (pas une demande initiale) en décidant que les moyens financiers des membres d'une famille de citoyens belges peuvent être pris en compte pour l'évaluation des moyens de subsistance. Le CE a fait valoir que parce que le CC, dans cette affaire, avait seulement envisagé une prorogation, le CC avait voulu limiter sa décision et son raisonnement aux seuls cas de prolongation d'un titre de séjour.
Le CCE a répondu en relevant que la demande adressée au CC concernait une question juridique différente de celle posée dans la présente affaire. Par conséquent, la décision ne pouvait pas servir de base légale à l'interprétation des mots «disposer de» qui soulevaient la question juridique pertinente en l'espèce.
Le CE a soutenu en outre que le législateur avait déjà traité des affaires relatives aux ressources financières familiales pour évaluer les seuils pertinents. Il a renvoyé à l'art. 10 bis § 1 de la loi du 15 décembre 1980.
La Cour a répondu à cet argument en relevant que sa décision actuelle était compatible avec ces dispositions parce que la législation prévoyait une distinction entre: les moyens dont le conjoint belge peut disposer (y compris les moyens des membres de la famille dont il peut disposer) et; les moyens des membres de sa famille dont il ne peut disposer.
CJEU - Commission v. Belgium (C-408/03)
CJEU - Singh et. al. (C-218/14)
Belgium - Cour Constitutionnel (CC), 26 September 2013, n° 121/2013
Belgium - Conseil d’Etat (CE), 23 April 2015, n° 230.995
Belgium - Conseil d’Etat (Council of State), 6 July 2005, No. 147.344